Cela fait plusieurs années que l’on parle avec enthousiasme de l’hydrogène naturel comme le candidat parfait de la transition énergétique. Mais, les décideurs publics ne veulent toujours pas investir dans cette ressource. On invoque souvent des défis technologiques et financiers. De faux arguments, d’après Aliou Diallo, PDG d’Hydroma.
Dix ans après sa découverte sur les continents, l’hydrogène naturel n’a toujours pas pris sa place dans la transition énergétique. Les gouvernements et les acteurs de l’énergie ont plutôt jeté leur dévolu sur l’hydrogène vert, avec des plans et projets à plusieurs milliards d’euros. Cet hydrogène est certes meilleur que le gris, le bleu ou le turquoise, mais il a des handicaps de taille. En effet, il faut beaucoup d’électricité et de grandes quantités d’eau pour le fabriquer. Ce qui est problématique à l’heure de la rationalisation des ressources. Des projets sont ainsi en cours pour résoudre ces défis.
Des obstacles à l’exploitation de l’hydrogène naturel ?
Si l’on doit saluer cet effort pour le verdissement de l’hydrogène manufacturé, force est de constater qu’il se fait au détriment de l’hydrogène naturel. Ce gaz présent sous nos pieds a l’avantage d’être totalement vertueux car abondant, renouvelable, propre et moins cher. Quand on leur demande pourquoi ils ne s’intéressent pas à cette ressource, les majors de l’énergie évoquent des obstacles technologiques et financiers. Pourtant au Mali, un entrepreneur modeste exploite l’hydrogène naturel depuis 2012 : Aliou Diallo, PDG d’Hydroma. Sa compagnie transforme ce gaz en électricité verte grâce à une unité pilote installée près du village de Bourakébougou.
A ce jour, Hydroma a réalisé 6000 mètres de forage (shallows, deep, et ultra deep) en partenariat avec des sociétés canadienne, australienne et européenne. Ce, avec les fonds propres d’Aliou Boubacar Diallo. L’homme d’affaires malien a dû notamment vendre ses actions dans la société minière Wassoul’Or pour financer les travaux de son groupe. Après huit ans de test, Hydroma a récemment annoncé la production à grande échelle d’hydrogène naturel. Pour le promoteur malien donc, les arguments avancés par les majors sont fallacieux. Le problème serait ailleurs…
Des intérêts colossaux en jeu
« Aujourd’hui les compagnies pétrolières fabriquent de l’hydrogène avec du méthane. Elles n’ont donc pas intérêt qu’il y ait une autre source d’hydrogène complètement indépendante de leur business de carbone », explique Aliou Diallo dans une récente interview sur Africable. « Le défi aujourd’hui c’est comment empêcher ces multinationales de mettre le billet sur l’hydrogène naturel pour en empêcher l’exploitation », ajoute-il. La solution viendra surement des Etats, qui devraient donner sa chance à l’hydrogène naturel. Cela obligerait les groupes pétroliers et gaziers à se tourner vers cette ressource pour assurer leur survie.
En attendant que le monde de l’énergie change enfin de fusil d’épaule, Aliou Diallo continu sa révolution énergétique au Mali. Et il a de grands rêves. « On peut être la première économie décarbonée du continent africain, le premier pays à faire rouler les trains à hydrogène, le premier pays avec des voitures à hydrogène et le premier à produire de l’électricité avec de l’hydrogène », énumère le PDG d’Hydroma. À une condition : « Si nous arrivons à sécuriser le nord », en proie à l’insécurité depuis 2012. Si cela est fait, « je vous assure que nous allons dépasser le Qatar et Abu Dhabi dans quelques années », promet-il.