En Espagne, un juge a prononcé, début octobre, la garde partagée d’un chien après le divorce de ses maîtres. Il a expliqué s’être conformé à une nouvelle loi en cours d’adoption qui considère les animaux comme des êtres sensibles, et non comme de simples propriétés.
Un tribunal de Madrid a ordonné, le 7 octobre 2021, la garde alternée d’un chien entre ses deux propriétaires. Il s’agit d’un couple récemment divorcé, dont chaque membre réclamait de vivre avec l’animal. Après avoir identifié un lien affectif entre le border collie, baptisé Panda, et les deux plaignants, le juge a conclut que tous deux en sont « co-responsables » et « co-gardiens ». Le chien vivra donc dans les deux foyers pour des périodes alternées d’un mois. Ce, avec un partage des frais vétérinaires et autres dépenses comme c’est le cas avec les enfants. Le couple vivait ensemble depuis 20 mois et avait adopté ce compagnon à poil depuis plus d’un an.
Un pas de plus vers la dé-chosification des animaux
Le magistrat madrilène a indiqué avoir suivi une nouvelle loi en cours d’adoption. Celle-ci considère les animaux comme des êtres sensibles, et non comme de simples propriétés. Il a aussi expliqué que l’amour qu’un propriétaire pourrait avoir envers son animal de compagnie n’exclut pas que ce dernier puisse le recevoir d’autres personnes. Cette décision abonde dans le sens d’une modification du code civil espagnol introduite en début d’année par le parti socialiste et la formation de gauche radicale Podemos, coalition au pouvoir.
Le nouveau texte vise la reconnaissance des animaux de compagnie comme des êtres vivants doués de sensibilité. Il rejette ainsi l’idée selon laquelle ils ne seraient que des objets à posséder. Cette loi prescrit également une garde partagée chez maman et papa, en cas de divorce des deux parents. Cela représente un pas supplémentaire vers la « dé-chosification » des animaux et leur prise en compte comme des membres à part entière de nos familles.
La Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie comme repère
L’avocate de la plaignante, Lola García, dit avoir eu recours à la Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie et pas exclusivement au Code civil pour demander la garde partagée de Panda. Cette Convention adoptée en 1987 et ratifiée par l’Espagne en 2017 préconise notamment que « Nul ne doit abandonner un animal de compagnie », surtout pas ses maîtres. « Je pense que cette affaire ouvre la porte aux avocats pour utiliser cette Convention au lieu du Code civil », suggère García, spécialiste des droits des animaux. En outre, l’avocate note que les décisions de justice dépendent actuellement d’un critère très subjectif puisque la modification effective de la loi tarde toujours.
Une décision à peu près similaire à celle de Valladolid en 2019
« Il y a des juges qui sont plus sensibles aux animaux, comme c’est le cas avec cette peine, et d’autres qui continuent à les considérer comme des biens. L’article 3 du Code civil dit que les lois doivent être appliquées en fonction de la réalité sociale, mais il y a beaucoup de juges qui ne l’appliquent pas », regrette Lola Garcia. Notons qu’en 2019, le tribunal de première instance de Valladolid avait déjà déclaré la copropriété d’un chien nommé Cachas pour un couple séparé. Il avait décidé que chacun des propriétaires profiterait de l’animal par périodes de six mois chaque année. Mais, le juge n’avait pas parlé de l’animal comme d’un être vivant sensible. Seulement d’un objet de propriété. D’où le caractère inédit de la décision du tribunal de Madrid.