L’objet conçu par un ancien cadre de Google se présente comme un gadget anti-technologie qui exploite les réflexes psychologiques pour aider l’utilisateur à décrocher des écrans.
L’omniprésence de la technologie dans la vie quotidienne tend à devenir problématique face à la dépendance qui se développe vis-à-vis de ces outils pourtant censés faciliter l’existence. Il en va ainsi du smartphone, devenu en quelques décennies l’un des objets les plus utilisés que le monde ait jamais conçus.
Dans ce contexte, certains réfléchissent aux moyens de mettre fin à cet attachement dont le piège réside dans sa capacité à happer l’utilisateur à son insu. C’est ainsi qu’est venue à Eric Antonow l’idée du “Methaphone”.
Née d’une plaisanterie avec ses enfants dans un restaurant plus tôt cette année, en référence à la méthadone – médicament utilisé pour aider les personnes dépendantes à l’héroïne et autres opioïdes à se sevrer -, l’idée a donné naissance à quelque chose de concret : un objet représentant un smartphone sans en être vraiment un.
Il s’agit d’une plaque d’acrylique transparente de 15 centimètres, aux coins arrondis comme un iPhone. Mais c’est à peu près tout ce qui la relie à un téléphone portable. Elle n’a ni écran, ni fonction, ni connectivité. Juste un objet à tenir, à toucher, à regarder… ou à travers lequel observer le monde réel.
L’art de ne rien faire dans un monde hyperconnecté
L’idée prend forme grâce à ChatGPT, qu’Antonow utilise pour créer les premiers visuels. En quelques jours, le prototype devient réalité et une campagne de financement participatif voit le jour sur Indiegogo. Le slogan ? “Laissez votre téléphone sans manque ni sevrage.”
L’objet connaît le succès grâce notamment à Catherine Goetze, une influenceuse TikTok spécialisée dans la tech. En deux semaines seulement, sa vidéo du methaphone a été vue plus de 150 millions de fois sur TikTok, Instagram et X.
« Je voulais un dispositif qui vous ferait réfléchir. C’est un miroir pour vos sentiments envers le téléphone. Vous le retournez dans vos mains et des questions peuvent commencer à surgir. ‘Woah, comment cette chose peut-elle avoir un tel pouvoir et une telle présence dans ma vie ? À quoi cela ressemblerait-il de l’emporter avec moi toute la journée ?’ », explique Eric Antonow, ancien cadre marketing chez Google et Facebook, est pas à son coup d’essai en matière d’objets décalés.
Quand la parodie devient thérapie comportementale
Au-delà de l’aspect humoristique, le Methaphone vendu à 25 dollars, soulève des questions profondes sur notre dépendance numérique. Anna Lembke, chercheuse spécialisée dans les addictions à l’École de médecine de Stanford et auteure de “Dopamine Nation”, y voit un outil thérapeutique potentiel.
“Nos téléphones sont devenus comme des tétines. Nous les gardons près de notre corps, nous les touchons d’innombrables fois par jour“, explique-t-elle dans les colonnes de Wired.
Le Methaphone pourrait, selon elle, court-circuiter la boucle de l’habitude : on conserve les gestes, mais sans la récompense dopaminergique. Comme un fumeur utilisant une cigarette électronique sans nicotine : “Le rituel demeure, mais l’effet disparaît”, appuie cette spécialiste.