BTP : Eiffage, pionnier du recyclage et de l’économie circulaire

BTP : Eiffage, pionnier du recyclage et de l’économie circulaire

5 septembre 2022 0 Par La Rédac

Avec la création de Demcy en 2021, le groupe de BTP Eiffage donne toute sa place à sa filiale dédiée à la déconstruction et au recyclage des matériaux. Essentiel à l’économie circulaire et au développement du bas carbone dans le secteur du BTP,  le recyclage sur les chantiers se décline désormais en plusieurs innovations.

Devinette : comment les entreprises du BTP engagées sur les chantiers du Grand Paris Express vont-elles pouvoir gérer les quelque 45 millions de tonnes de déblais générés ? Que ce soit lors de l’excavation de la terre par les tunneliers ou lors de la démolition de constructions précédentes, les bâtisseurs ont besoin d’alliés expérimentés dans deux domaines : la déconstruction et le recyclage des déchets de chantiers. Au sein d’Eiffage, cette double dimension est aujourd’hui prise en compte de façon intégrée dans l’offre de services du groupe. On ne s’improvise pas expert en la matière du jour au lendemain.

Dialogue autour du Grand Paris Express

Le cas du chantier du siècle est saisissant par son ampleur : 200km de tunnels creusés, 68 nouvelles gares construites – en faisant table rase de ce qui existait auparavant sur les sites de construction –, des milliers de camions sortant des chantiers… « Nous sommes dans des zones à forte densité de population, près de la capitale du pays, avec la dimension politique que peut revêtir ce genre de projet, qui va mettre plus de 10 ans à être complétement opérationnel. L’entrepreneur est donc face à une multitude d’aléas », avertit Guillaume Sauvé, président d’Eiffage Génie Civil. Des aléas qui peuvent avoir des conséquences sur tout l’environnement des chantiers de déconstruction puis de construction.

 

Sur le terrain, la déconstruction est en quelque sorte une phase « 0 », avant le démarrage des travaux à proprement parler. Elle débute par un dialogue incontournable avec les parties prenantes. En partenariat avec la Société du Grand Paris (SGP) – le donneur d’ordre public –, le groupe Eiffage communique en effet avec les acteurs de terrain, collectivités locales et associations de riverain, pour expliquer sa démarche. « C’est un point-clé que nous traitons avec la SGP lors de nos réunions de chantier : nos contrats de déconstruction, sur la Ligne 16-1 ou la Ligne 15-est du Grand Paris Express, prévoient la prévention des nuisances et un système d’information », assure Bruno Cahen, directeur de Demcy, la filiale d’Eiffage dédiée à la déconstruction et au recyclage, née de la fusion de plusieurs PME françaises spécialisées. Si les riverains s’attachent surtout aux futures installations de transport qui desserviront avantageusement l’Ile-de-France, ils ne se doutent probablement pas de tout ce qui est mis en œuvre sur le terrain pour réutiliser les matériaux de déconstruction, et limiter ainsi les déchets de chantier.

Comment fonctionne le recyclage de déblais ?

En région parisienne et ailleurs, comme en Norvège ou jusqu’en Mauritanie où le groupe Eiffage mène de grands chantiers, la musique est la même. La déconstruction et le recyclage obéissent à des processus établis, conformes aux directives européennes régissant le secteur du BTP qui prévoient un taux de réutilisation minimum de 70% des déblais de chantier, et la mise en place de circuits courts. « Aujourd’hui, quand on déconstruit un bâtiment, nous sommes capables de recycler 94% des matériaux, reprend Guillaume Sauvé. Les 6% qui restent sont issus essentiellement du désamiantage. En 2020, Eiffage a valorisé 500000 tonnes de matériau venant du recyclage. Le fait de travailler en boucle très courte avec la filiale démolition nous permet un partage optimal des expériences et des solutions, et donc accroit notre efficacité opérationnelle. Il est essentiel, en premier lieu, de caractériser rapidement les matériaux, pour pouvoir les trier, les segmenter, les évacuer en optimisant toute la chaine : extraction, transport initial, stockage intermédiaire, transport final et traitements les plus adaptés et les moins chers possibles en fonction de ce qu’on recycle. »

Pour mettre en place cette chaîne de valeur, il faut donc d’abord établir la nature des déblais de chantier et prévoir leur réutilisation ou leur réemploi. Pour cela, Eiffage – en partenariat avec le Commissariat à l’énergie atomique – a mis au point le système Carasol, capable d’analyser la nature des déblais en 90 minutes, au lieu de plusieurs jours. Cette innovation a changé la donne : elle permet de ne plus mobiliser d’espaces de stockage sur les chantiers et affine la traçabilité des matériaux. « Le système Carasol permet des gains de temps, et une réduction à la fois de notre empreinte carbone et des frais de fonctionnement des chantiers, souligne Pascal Hamet, directeur du lot nº1 de Ligne 16 du GPE chez Eiffage Infrastructures. L’ensemble des chantiers du Grand Paris Express produira environ 45 millions de tonnes de déblais, dont 6 millions pour le chantier de la Ligne 16. Ces 6 millions de tonnes proviennent pour moitié des tunnels, pour moitié des ouvrages. En moyenne, chacun de nos tunneliers produit 4500 tonnes par jour. Le dispositif Carasol était donc vital. »

Outil essentiel pour mettre en place l’économie circulaire dans le BTP, Carasol n’est pas la seule innovation du groupe Eiffage dans le domaine du recyclage. L’entreprise française a par exemple reçu le label « Produit biosourcé » pour trois de ses matériaux de construction dans le domaine routier, l’émulsion Recytal®, le procédé Recytal®ARM et l’enrobé Recytal®Biocold. Ce label, décerné par Karibati, une startup spécialisée des matériaux biosourcés et reconnue entreprise solidaire d’utilité sociale, permet de garantir la quantité et l’origine des matières biosourcées contenues dans les matériaux de construction. Valorisation et traçabilité des déchets deviennent en effet l’alpha et l’oméga du recyclage. « La loi AGEC va imposer ce type de dispositifs, nous avons préféré prendre un temps d’avance car nous avions la volonté de développer notre stratégie bas carbone et l’économie circulaire locale bien en amont », ajoute Bruno Cahen.

Recyclage, réutilisation et réemploi, des métiers à part

Toutes ces innovations sont invisibles pour le grand public. Elles font pourtant aujourd’hui partie intégrante des nouvelles méthodes de travail du BTP. Une fois un chantier entamé, le traitement des déchets suit une hiérarchisation invariable, selon trois catégories. « La première – l’élimination ou envoi en décharge – se situe tout en bas de la pyramide, détaille le directeur de Demcy. Le deuxième – la valorisation énergétique – permet la récupération d’énergie grâce à l’utilisation sous forme de combustibles solides de récupération (par exemple du bois « B », c’est à dire traité, broyé). Le troisième niveau, le recyclage, consiste à remettre en petits morceaux le bois, le verre et le plastique par exemple, afin de fabriquer du neuf avec du vieux. »

Mais le traitement des déchets va bien au-delà du recyclage. « Au-dessus du recyclage, la filière déconstruction sélective a mis en place des usages bien meilleurs, en termes environnementaux, car ils consomment moins de ressources naturelles, d’énergie et de transport, et engendrent moins de nuisances, poursuit Bruno Cahen. Tout d’abord, il y a la réutilisation, également appelée revalorisation matière, qui s’opère en circuit local. Par exemple, quand nous concassons un béton et que nous le réutilisons sur site comme granulat. C’est évidemment mieux que de l’envoyer sur une plateforme de laquelle il sera réexpédié car cela économise un double transport (CO2 et nuisances évitées). »

Pour aller plus loin, la filière BTP développe aujourd’hui de plus en plus le réemploi, dernier étage de l’édifice. « Il consiste à réutiliser dans un usage identique des équipements, produits ou matériaux de construction, sans transformation, ajoute le directeur de Demcy. Cela concerne le mobilier, les poutres métalliques, les équipements électriques, des portes, des fenêtres… »

Dans le cadre de sa politique de RSE, le groupe Eiffage a d’ailleurs mis en place des programmes spéciaux de réemploi des matériaux et objets de chantier, à l’attention de l’économie sociale et solidaire. Demcy a par exemple innové avec des magasins éphémères proches de ses chantiers de déconstruction, comme en Isère sur le chantier du Cadran solaire. « Nous avons travaillé ici avec le donneur d’ordre public foncier local, en partenariat avec Ecomat 38, un acteur de l’économie sociale et solidaire, se félicite Bruno Cahen. Nous avons formé le personnel d’Ecomat 38, nous avons fait une dépose soignée d’un certain nombre d’équipements remis en état dans un atelier spécialement créé sur place, à cette occasion. C’est un magasin éphémère comme il en existe pour l’habillement, avec un showroom et un catalogue dématérialisé. Cela a extrêmement bien fonctionné. » En seulement six mois, Demcy a en effet atteint 46% de réemploi, une première en France. Des magasins éphémères dans le BTP, une innovation pour le moins inattendue…