Expérience : ils retrouvent les rayons du soleil après 40 jours dans une grotte en Ariège

Expérience : ils retrouvent les rayons du soleil après 40 jours dans une grotte en Ariège

25 avril 2021 0 Par La Rédac

 

Quinze membres de la mission Deep Time, volontairement confinés dans une grotte en Arège pendant quarante jours, ont retrouvé les rayons du soleil au matin du samedi 24 avril 2021. Face à la presse, ils ont relaté leur vécu, marqué notamment par la désynchronisation du sommeil et la perte de la notion du temps.   

Les 15 volontaires (sept femmes et huit hommes âgés de 27 à 50 ans) qui s’étaient confinés volontairement dans une grotte de l’Ariège (Pyrénées), dans le cadre d’une expérience scientifique sur le fonctionnement de notre cerveau, ont retrouvé la lumière au matin du samedi 24 avril 2021. Au total, ils ont passé 40 jours dans la caverne, où ils ont dû s’habituer à une température de 10,5 degrés et 100 % d’humidité. Ils ont été contraints de générer leur propre électricité par un système de pédalo et puiser l’eau à 45 mètres de profondeur.

Éblouis par le soleil à leur sortie, les membres de la mission Deep Time avaient le visage un peu pâle et l’air un peu déçu. Il faut dire qu’entre la pandémie de Covid-19 et le réchauffement climatique, il y a de quoi avoir envie de rester quelques mois de plus sous terre. « L’humidité est très impactante. On a vu au fur et à mesure du temps et des fatigues, les besoins de nourriture augmenter », a confié le leader du groupe, l’explorateur franco-suisse Christian Clot, fondateur du Human Adaptation Institute.

La relativité du temps vécue sous terre

Les autres participants de la mission Deep Time ont notamment évoqué l’impression une perte de la notion du temps. Ils avaient l’impression que beaucoup moins de temps s’était écoulé lorsqu’ils ont été prévenus de la fin de la période de 40 jours. « C’était un vrai choc. Je croyais qu’il restait cinq ou six jours encore », a déclaré Emilie Kim-Foo, une infirmière de 29 ans.

« On n’avait pas de repères temporels », a ajouté Tiphaine Vuarier, une psychomotricienne de 32 ans, rappelant que aucun volontaire ne possédait de montre, ni de téléphone. Pendant l’expérience, les 15 confinés ont aussi constaté une grande disparité concernant les cycles de sommeil. En effet, quand certaines personnes se levaient, d’autres se couchaient. Ceux qui étaient éveillés passaient leur temps à jouer aux cartes, à lire et à explorer la grotte, qui court sur des centaines de mètres.

En outre, Marie-Caroline Lagache, une bijoutière de 50 ans, a eu l’impression que les membres de l’expédition ont « probablement plus dormi certaines nuits et moins d’autres ». Quant à Arnaud Burel, un biologiste de 29 ans, il ne se souvient pas de tous ses rêves. « J’ai eu une bonne surprise. Je me souviens de quelques rêves dans la grotte », a-t-il dit.

Des scientifiques un peu sceptiques sur la démarche

D’après M. Clot, l’expédition visait à étudier les capacités d’adaptation du cerveau face à la perte de repères spatio-temporels. Avec l’aide de chercheurs, des données sur les capacités cognitives des participants ont été recueillies avant l’entrée dans la grotte. Elles  seront comparées à celles recueillies à la sortie afin notamment d’étudier les changements du système nerveux dans la grotte. Malgré l’association de chercheurs, la démarche de la mission Deep Time suscite des critiques de la part d’autres scientifiques, qui soulignent l’absence d’un cadre suffisamment rigoureux.

Pierre-Marie Lledo, directeur du laboratoire Gènes, Synapses et Cognition (CNRS) et de l’unité « Perception et Mémoire » à l’Institut Pasteur, note par exemple l’absence d’un « groupe contrôle » permettant de comparer les résultats des participants confiés à ceux d’autres restés à l’extérieur. Ce qui empêche de valider scientifiquement les résultats selon lui. Etienne Koechlin, directeur du laboratoire de neurosciences cognitives à l’Ecole normale supérieure (ENS), qui participe aux recherches de Deep Time, défend plutôt le caractère novateur de la mission.