Saison plus courte, neige artificielle … le ski face au dérèglement du climat

Saison plus courte, neige artificielle … le ski face au dérèglement du climat

1 janvier 2023 0 Par Guillaume

Les zones montagneuses sont plus victimes que les plaines du dérèglement du climat : la hausse de température y est souvent plus conséquente qu’en moyenne sur la Terre, affirmait il y a deux ans le groupe Météo France.

Puis, deux années écoulées, on observe les effets du réchauffement dans les montagnes du pays entre un faible enneigement, la fonte du permafrost ou l’éboulement des glaciers. Il est nécessaire que les stations hivernales prennent en compte ce changement. Cela est déjà fait avec la célèbre station de La Plagne (offrant plus de 130 pistes), située dans le département de la Savoie. Sa décision ? Supprimer des infrastructures spécifiques.

Démontage des structures

Les skieurs ne pourront plus aller au glacier de la Chiaupe via La Plagne. Effectivement, la station hivernale, une des plus populaires à l’international, va désosser sa gare d’arrivée présente sur ce glacier à plus de 3 250 mètres d’altitude. La Compagnie des Alpes qui s’occupe de la station va poser ses remontées mécaniques plus bas.

Le glacier a grandement diminué de taille. La fonte du permafrost causée par le dérèglement du climat engendre des glissements de terrains puisque la glace ne possède plus sa fonction de liant et la roche s’agite. Dans cette situation, la destination des télécabines a été modifiée.  Conserver les équipements sur le glacier de la Chiaupe aurait provoqué des coûts conséquents, sans être certain d’un futur radieux pour ces derniers. C’est pourquoi les télécabines ont été mises 200 mètres plus bas.

C’est un phénomène global de recul des glaciers et de fonte du permafrost qui se déroule actuellement à l’échelle planétaire, cela étant plus prononcé dans certaines zones du globe. Cette conséquence directe du réchauffement actuel s’observe à l’échelle d’une vie humaine.

À la Plagne, en 2021, entre cinquante mille et cent mille mètres cubes de roches sont tombés du vieux glacier de Bellecôte. Cette catastrophe a validé les décisions de la station de ski qui va supprimer les pylônes, les câbles et les édifices de la télécabine et des deux télésièges. Cela sera fait durant l’été 2023. La flore reprendra ses droits sur environ cinquante hectares.

Un phénomène global de recul des glaciers et de fonte du permafrost est visible depuis des années, voire des décennies.Effectivement, peu importe ce qui va arriver d’ici là , environ un tiers des glaciers faisant partie du patrimoine mondial de l’Unesco ne seront plus là d’ici à 2050.

Saisons plus courtes et canons à neige irremplaçables ?

Quand les stations sont plus basses, le changement est aussi là mais d’une façon différente. À cause du manque de neige, leurs saisons de ski se voient diminuer. Tous les ans, de multiples stations ont différé l’ouverture de la saison, à débuté par Val Thorens dans le département de la Savoie. La plus haute station du continent européen a commencé sa saison beaucoup plus tard qu’en temps normal. Il faut dire que la météo de l’automne est désormais nettement plus douce. L’absence de neige en novembre ne peut pas permettre un retour avec les aux pieds. Même chose pour la célèbre station de Tignes. Elle a pu ouvrir une seule petite piste en novembre, loin de ses standards habituels.

Les chaînes pyrénéennes sont aussi concernées par ce triste phénomène. Ainsi, les stations de la deuxième montagne de France ont retardé leurs ouvertures respectives. De façon plus générale, l’étendue de neige au sol, la grandeur des surfaces enneigées et le temps d’enneigement vont baisser inexorablement au fil des décennies.

Désormais, l’utilisation de la neige artificielle est une solution phare afin de conserver une pratique du ski à un niveau semblable. Conséquence : des projets de retenues collinaires pour garder l’eau par rapport à l’usage des canons à neige sont de plus en plus nombreux. Or, la ressource en eau se fait de plus en plus rare. C’est pourquoi la pose de canons à neige dans le but de conserver une activité du ski est pointée du doigt. À la Clusaz par exemple, un projet de cinquième retenue collinaire (ouvrages de stockage de l’eau remplies par les eaux de surface et les eaux de ruissellement) a été vivement critiqué. Une ZAD a été créée puis la justice a stoppé ce plan.

Ainsi, la neige artificielle devrait être de plus en plus utilisée par les stations dans un avenir proche. Effectivement, d’ici 2050, pour conserver un enneigement semblable à l’intervalle 1986-2005, il faudra compter sur un pourcentage de couverture de 45 % de neige de culture affirme le groupe Météo France. L’effet du dérèglement du climat sur l’enneigement dans les stations est conséquent à partir de 1,5 degré de réchauffement global. Si la barre des trois degrés est dépassée, la neige de culture devient insuffisante pour contrebalancer avec la diminution de l’enneigement naturel.

Besoin de diversification des activités

Au lieu d’essayer de garder à tout prix l’enneigement de leurs zones skiables, des stations hivernales font le choix de délaisser les canons à neige. Ainsi, la présidente de la Drôme a fait le choix de délaisser la neige de culture. Tandis que le département est une zone adorée pour les activités hivernales, elle se dit prête à affronter la transition et trouver des solutions adéquates au dérèglement climatique. Des activités annexes, se déroulant autant en hiver que durant la saison estivale, sont à l’étude.

Néanmoins, les stations hivernales ont conservé un niveau d’investissement élevé en 2021. De multiples stations présentes en moyenne altitude, aidées par le gouvernement dans son plan Avenir Montagne, essayent d’offrir un nouveau modèle touristique, ouvert en continu durant la totalité de l’année.

Or, ce changement des stations de ski vers le tourisme de masse a ses points faibles. Il faut que ces lieux de montagne se penchent sur leurs propres redirections. Les échanges avec la totalité des acteurs doivent aller plus loin. Les associations doivent aussi y participer.

En tout cas, ce changement poussé a déjà débuté à Valloire, où il n’y a plus de pistes situées en-dessous de deux mille mètres d’altitude. Autre exemple avec Métabief, située dans le territoire du Haut-Doubs, qui a fait le choix de l’anticipation, en dirigeant ses investissements en direction de la transition. Une chose est sûre : les montagnes du pays ont pris conscience du phénomène et préparent la mutation.

Alors, l’extinction des stations hivernales telles que nous les connaissons est-elle inexorable ? En prenant en compte qu’il y a un moins de neige en moins depuis 1960, on peut légitimement répondre « oui » à cette question.