Faut-il délaisser l’objectif de restreindre le réchauffement à 1,5 degré ?
14 janvier 2023Restreindre la hausse du réchauffement à 1,5 degré en comparaison à la période préindustrielle est maintenant quasiment impossible. Intégrer cette finalité dans l’Accord de Paris représente un choix plus politique que scientifique, le but étant de décrocher une unanimité entre cet accord. Ce sont les petits États insulaires qui le souhaitaient.
Cette limite de réchauffement sera atteint en 2035. Pour que ce seuil ne soit pas atteint, il est nécessaire que les rejets de gaz à effet de serre se terminent dès cette année. Autre condition : la capture du carbone de l’atmosphère. Or, cela n’est pas réalisable. Malheureusement, 2035 est proche et la barre des 1,2 degrés de réchauffement est déjà là.
Un réchauffement augmentant d’un dixième de degré chaque cinq ans
Avant le COP 27, une lettre ouverte d’un collectif international de scientifiques nommé « Scientist Rebellion » avait pour objectif de délaisser cette finalité de limitation à 1,5. Le but était simple : provoquer un électrochoc. Or, effectuer ce genre de demandes avant la COP 27 relevait plutôt du sabotage qu’autre chose. La conférence qui s’est déroulée en 2022 en Égypte a quant à elle été plutôt symbolique, comme beaucoup d’autres éditions. Il faut savoir que les États désirant le plus délaisser cet objectif de 1,5 degré sont les pays producteurs d’hydrocarbures, regardant là leur seul intérêt.
Conserver de tels objectifs est nécessaire. Or, il faut qu’ils soient réalisables et accessibles pour tous. Ainsi, parler des finalités de température à long terme représente la meilleure façon de retarder les actions pertinentes pour la planète climat. Faisons un parallèle : si je veux perdre quinze kilos avant 2035, il y a un grand danger que je ne fasse rien jusqu’à 2034.
C’est pourquoi il est préférable d’opter pour des accords avec des buts rapprochés et quantifiables annuellement afin que les pays respectent leurs engagements, ce qui est un concept de la démocratie. Plus que de simples chiffres de température à long terme, faire le choix d’engagements de budget carbone annuels est souhaitable. Même si les accords seront compliqués à obtenir, les États signataires devront entrer rapidement en action et ne pas seulement attendre.
Le réchauffement n’est pas de la realpolitik
Les voix des scientifiques par rapport à l’abandon de cet objectif de 1,5 degré ne sont pas entendues, le seul et unique but étant de provoquer un électrochoc chez les politiques et les gouvernements. Or, les individus en faveur de cet abandon n’ont pas conscience des réactions en cascade que cela pourrait engendrer.
Par rapport au réchauffement, il y a encore une grande marge d’incertitude. Si on se fie au Giec, même si cela diminue tous les ans, la probabilité qu’on soit en-dessous de 1,5 degré n’est pas nulle.
Finalement, il est compliqué de voir les effets positifs de délaisser cette finalité, qui avait été obtenue extrêmement difficile durant l’Accord de Paris, œuvre des petits états insulaires les plus en dangers face au dérèglement du climat. Preuve en est avec les terribles inondations de 2021 au Pakistan. Si de nos jours, les pays vulnérables ne désirent pas revenir dessus, c’est qu’ils savent que le réchauffement climatique ne s’apparente pas à de la realpolitik : l’objectif n’est pas de définir des objectifs qu’il est possible de remplir, mais de savoir quelle augmentation de température la Terre peut affronter.
À 1,5 degré, les effets sur la montée des eaux et l’environnement sont conséquents
Au contraire de ce qu’on entend souvent par rapport à l’Accord de Paris, ce dernier présente de nettes progressions. Il offre la possibilité de déterminer des horizons de temps aux pays et aux industriels. Il y a plus d’un an, l’Agence internationale de l’énergie a signifié que, pour respecter 1,5 degré, il était nécessaire de stopper tout investissement dans les énergies fossiles. Même si cela n’a pas été tenu, l’objectif demeure celui-là.
Si on le laissait de côté, le danger serait de dégrader l’impact de tels messages, et de laisser la porte ouverte aux lobbys de l’économie carbonée pour porter des objectifs moindre, cela tenant plus vers le deux degrés, voire trois degrés … Or, rien qu’entre 1,5 et 2 degrés, il y a pléthore de scénarios, avec des effets croissants sur la planète. Dans le cas où l’on laisserait de côté 1,5 degré, c’est en direction de 1,51 degré qu’il faudrait aller, ce qui n’est pas simple à assimiler pour le grand public.
Conclusion : il est nécessaire de garder l’objectif le plus ambitieux. Dans le cas contraire, le message envoyé ne serait pas positif. Les gouvernements, les industriels et les lobbys pourraient être moins exigeants envers eux-mêmes et relâcher la pression. On peut ici faire un parallèle avec la sécurité routière : le but de zéro mort est toujours de mise même si le risque zéro est impossible. Rendez-vous à la COP 28 à Dubaï aux Émirats arabes unis pour la suite des évènements !